Je pense que, avant de décrire Sado, ça vaut le coup de connaître l'homme grâce auquel, à Sado, tout a commencé. Plus tard vous allez comprendre pourquoi j'approfondis sa bio. Préparez-vous un thé vert et mettez-vous confortables parce que, cette fois, l'aventure est longue.
DEN TAGAYASU
Pendant ses années de lycée, Den organise une grève qui aboutit à la destitution du directeur de l'école. Fini le lycée, lorsqu'il fait sa demande d'inscription à l'Université Waseda sans trop d'espoir, il est accepté ! Ce nom ne vous dit peut-être rien, mais c'est l'une des Universités privées les plus prestigieuses du Japon. C'est comme dire à un américain "Harvard" ou "Yale". Den soupçonne que cette expérience d'organisation des lycéens est l'un des facteurs qui lui valent les faveurs de Waseda, dirigée par une organisation étudiante de gauche. Pendant ses études de littérature chinoise là-bas, Den est fortement impliqué dans plusieurs manifestations violentes en 1952. En raison de son activisme politique effervescent, susceptible de déborder à tout moment, Den est non seulement expulsé de Waseda, mais il quitte également Tokyo pour éviter toute arrestation éventuelle par les autorités. Il travaille comme ouvrier au port de Kobe, mais son esprit d'aventure, ajouté à la possibilité de voir partir des navires tous les jours, lui fait prendre un navire et aller travailler en Allemagne après seulement six mois.
L'Allemagne lui réserve des discriminations raciales, et à mon avis c'est à ce moment là qu'il comprend la force et la profondeur de son amour pour sa propre culture. Ce n'est pas un cas qu'une fois rentré au Japon il étudie sous la direction du professeur Miyamoto Tsuneichi.
Miyamoto Tsuneichi est l'un des plus grands éthnologues que le Japon ait connu. De 1930 à sa mort en 1981, il a habité dans plus de 1200 maisons rurales, laissant un patrimoine d'enregistrements sur les traditions de son pays tout simplement énorme. L'intérêt de Tagayasu pour le folklore se manifeste également dans son activité au sein du groupe appelé Warabiza, qui interprète de la musique folklorique russe puis de la danse et de la musique folkloriques japonaises.
Entre temps, il tombe amoureux, forme un couple puis une famille. En vacances avec sa famille, en 1958, Den va sur l'île de Sado pour la première fois. Charmé par les traditions locales, il parle avec les habitants de l'île et découvre qu'ils sont attristés : Sado perd sa population, les jeunes partent chercher du boulot dans les villes et l'âge moyen monte. Une île destinée à rester déserte ? Il quitte l'île après six mois, mais y retourne en 1968 avec sa famille dans l'intention d'y vivre.
La situation n'a pas changé, et Tagayasu commence à réfléchir à un plan pour ramener des jeunes sur l'île et créer un groupe de travail pour pas que les fêtes traditionnelles de Sado, qu'il trouve magnifiques, ne disparaissent pas. Il décide de se concentrer sur l'aspect musical. Entre temps, il a obtenu le permis de retaper et habiter une ancienne école. Ces 15 dernières années il a parcouru le Japon en long et en large, et ça, plus ses études avec le Professeur Miyamoto, lui a donné une grande familiarité avec les festivals japonais de Taiko. C'est donc avec un stage de taïko qu'il veut lancer sont activité locale. Il contacte le présentateur Ei Rokusuke et lui demande de transmettre une annonce dans son programme radio. Une quarantaine de jeunes répondent à l'annonce, se rendent sur l'île pour participer au stage et une dizaine d'entre eux restent vivre là-bas, formant un groupe d'expérimentations musicales. Je sais ce que vous pensez en ce moment : une dizaine, c'est énorme.
Mais l'annonce fut passée en 1970, une époque de pleine liberté, curiosité, recherche, aventure, une époque où les communes vivaient leur moment de gloire. Où l'on pensait vraiment que "famille" pouvait signifier de tout, même une quarantaine de personnes, et pas forcément du même sang, mais plutôt avec les mêmes idéaux, les mêmes valeurs, les mêmes rêves.
Les premiers mois, les jeunes qui se rassemblent sur Sado ont tendance à faire trop la fête et Den décide d'établir quelques règles strictes pour Ondekoza. Ils ne doivent pas regarder la télévision ni lire les médias, l'alcool ou le tabac ne sont pas autorisés. La caractéristique (qui deviendra) principale de leur entraînement, la course, s'ajoute aux séances de Taiko, de danse et de flûte. En 1971, le groupe Ondekoza est né. Les membres habitent ensemble comme dans une commune. Ils ont leur potager, leur atelier de poterie, leur salle d’entraînement. Peu après, il décident de consacrer l’encaissement des concerts à la construction d’un Centre d’Études. Ils partagent la même conviction sur la pratique du taiko : pour eux, l’étude des rythmes ne peut pas faire abstraction d’un lourd entraînement physique. Pour Den, la formule de vie est « jouer + courir ». Tous les jours ils se lèvent à 4h du matin pour courir 10 km, dans la neige ou dans n’importe quelle condition.
ONDEKOZA
Pourquoi le groupe choisit-il ce nom ? "Za" indique un théâtre ou, comme dans ce cas, un groupe, dans le sens de compagnie, comme une compagnie théâtrale.
Ondeko (鬼太鼓) est un mot composé de « démon » et « tambour », et c’est juste une autre façon de lire ces idéogrammes qui normalement se prononcent ONIDAIKO. Malgré la renommée et la popularité de l'Ondeko, la danse du tambour démoniaque, on en sait relativement peu sur ses origines.
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